Quel impact le confinement a-t-il eu sur le travail des freelances ?
Sommaire
- Comment travailles-tu depuis le début du confinement ?
- En tant que freelance, quelles aides peux-tu espérer de la part du gouvernement ?
- Quels sont tes projets actuellement ? Parviens-tu à travailler ?
- Le jeu vidéo vit un regain actuellement avec le confinement, cela a-t-il un impact sur ton travail et tes projets ?
- Comment vois-tu ton avenir proche et plus lointain ?
- Un impact inquiétant pour les métiers indépendants
Le monde vit actuellement une situation inédite sur le plan sanitaire et économique. Un grand nombre de secteurs (pour ne pas dire tous), est touché par le confinement que nous avons vécu. Le jeu vidéo ne fait pas exception à la règle. Nous avons pu remarquer cependant que l'obligation de rester chez soi avait profité aux jeux vidéo, mais est-ce le cas pour tous les acteurs du monde du jeu vidéo. Les freelances ne seraient-ils pas les grands oubliés de ce regain ?
Deux d'entres eux ont accepté de nous parler de leur situation et de partager leurs inquiétudes : Emmanuel Corno et Christophe Galati.
- Emmanuel Corno est game & narrative designer en freelance. Il a travaillé sur des jeux tels que Endless Legend, Event[0], ou encore Alt-Frequencies, et donne des cours dans différentes écoles de jeux vidéo en parallèle de son activité de créateur de jeux.
- Christophe Galati, est un créateur de jeux indépendant. On le connaît notamment pour son jeu Save me Mr Tako, jeu de plateforme en 2D où vous devrez résoudre des énigmes, explorer de mystérieux donjons et combattre des chefs tenaces pour mettre fin à la guerre entre le royaume sous-marin de poulpe et le monde terrestre humain.
Comment travailles-tu depuis le début du confinement ?
E.C : Concernant mon activité de créateur de jeux, rien n'a vraiment changé ; je travaillais déjà à distance depuis mon salon. Les seules différences sont que je n'ai plus possibilité de me rendre de temps en temps sur place pour coopérer plus efficacement avec les équipes, et que je ne peux plus développer mon réseau grâce aux salons pros.
En revanche, mon activité d'intervenant pro en école est perturbée. Je dois désormais faire tous mes cours par Discord et revoir intégralement la façon dont j'évalue mes étudiant·e·s.
C.G : Comme d'habitude, mais plus démotivé à cause du climat ambiant.
En tant que freelance, quelles aides peux-tu espérer de la part du gouvernement ?
E.C : Le gouvernement a annoncé une aide de 1500€ pour les mois de mars et avril si notre chiffre d'affaire baisse par rapport à 2019 sur cette période là. "Malheureusement", je ne suis pas concerné... mais ça tient surtout du hasard des calendriers ! Cette année promet d'être bien plus difficile sur les 12 mois. Des aides pour les auteurs et autrices sont aussi prévues, mais rien n'a été encore annoncé pour le moment.
C.G : A cause du confinement tous les salons où espérer rencontrer des financeurs ont fermé, du coup on perd en opportunité de gagner de la visibilité et de vivre pendant le développement. En tant qu'indépendant on n'est pas salarié, du coup on ne peut pas avoir de chômage partiel.
Quels sont tes projets actuellement ? Parviens-tu à travailler ?
E.C : Les années scolaires se terminent et mes clients sont dans l'attente de financements que la crise risque de grandement retarder. Autrement dit, je traverse une période de vaches maigres et travaille de plus en plus sur des projets personnels (donc sans argent).
C.G : Je travaille sur un nouveau jeu, Himitsu Project, qui avance un peu au ralenti vu que les équipes ne peuvent pas se voir.
Le jeu vidéo vit un regain actuellement avec le confinement, cela a-t-il un impact sur ton travail et tes projets ?
E.C : Il est encore trop tôt pour le dire. Certes, les ventes de dématérialisé carburent, mais ce n'est pas le cas du physique, et je ne sais pas combien de temps cela va durer si tout le monde continue de perdre son boulot. Pour le moment, j'ai surtout peur que la crise rende les éditeurs plus frileux, et donc les fasse investir leurs ressources sur leur catalogue déjà existant plutôt que de financer de nouvelles productions. On verra dans les prochains mois.
C.G : On prend plus le temps de jouer ce qui est aussi inspirant, de mon coté j'ai eu un gain de productivité au niveau de l'écriture et de la recherche pour la pré-production du jeu.
Comment vois-tu ton avenir proche et plus lointain ?
E.C : À ce stade-là, tout est encore très flou dans ma tête. Si la crise impacte bel et bien la politique des éditeurs comme je le crains, et que le confinement nuit au recrutement des élèves des écoles de jeux vidéo dans lesquelles j'interviens, je pourrais encore m'investir dans un projet personnel et espérer un financement par une aide culturelle, ou bien croiser les doigts pour trouver une mission pour un client issu du public (par exemple, un institut culturel). Mais si tout cela venait à échouer, il faudra que je candidate dans un studio plus classique en tant que salarié, ce qui n'est pas forcément aisé et changerait radicalement mon mode de vie de ces dernières années. Fort heureusement, je vis à Paris et la capitale compte quelques grandes entreprises solides sur leurs pieds.
C.G : J'espère trouver les financements et pouvoir continuer ma prod l'esprit plus serein.
Un impact inquiétant pour les métiers indépendants
Selon le cabinet Futuresource, spécialiste des prévisions et perspectives stratégiques en technologie, médias et divertissement, avec le confinement le jeu vidéo est devenu "la star de l'industrie du divertissement... La croissance des jeux sera supérieure à la moyenne du secteur, pour atteindre 36 % de parts de marché d’ici 2023, contre 31 % en 2019". Hors la question reste la même et les prévisions ont beau être très flatteuses, il n'en reste pas moins que les freelances ne surfent pas sur cette vague et voient leurs projets repoussés ou abandonnés au profit de licences déjà existantes. Espérons néanmoins que ces prévisions très optimistes pourront bénéficier à tous les acteurs du jeu vidéo.