12 Minutes - Un thriller qui tourne en rond
12 Minutes ne cessait de faire parler de lui ces dernières années dans bon nombre de conférences. Le dernier-né d’Annapurna Interactive est désormais disponible sur le Gamepass depuis quelques jours et a reçu un accueil pour le moins mitigé de la part de la presse et des joueurs. Après les quelques heures que durent le titre, 12 Minutes s’est avéré être une œuvre complexe à aborder tant son contenu est dérangeant à cause de sa maladresse d’écriture. 12 Minutes est pour moi un mauvais jeu, mais au-delà de ça il est un parfait exemple de ces jeux qui ne sont peut-être pas prêts à aborder des sujets graves.
12 Minutes en bref
12 Minutes se présente comme un jeu d’aventure point & click en vue zénithale. On y incarne un homme rentrant chez lui où sa femme l’attend pour lui annoncer une nouvelle, la soirée bascule lorsque la police frappe à la porte et que le héros se rend subitement compte qu’il est coincé dans une boucle temporelle de… 12 Minutes. Il devra revivre sans cesse les événements en essayant de se sortir de cette situation complexe.
Ce pitch de départ intrigant est en grande partie responsable de l’engouement autour du jeu, bien aidé par un casting vocal trois étoiles composé de Daisy Ridley, James McAvoy et Willem Dafoe et une direction artistique léchée. Si ces deux éléments sont au rendez-vous et sont la force du jeu, 12 Minutes pèche à tous les autres niveaux.
Mécanisme grippé
En terme technique tout d’abord, avec une réalisation assez pauvre qui certes possède des animations soignées mais qui deviennent très vite robotiques et hachées si le joueur s’interpose au point de parfois paraître sorties d’un jeu né il y a 20 ans. Le jeu n’appréciant guère l’intervention du joueur, nous avons assisté à deux crashs et un soft lock lors des premières heures du jeu. Un problème peut-être réglé à l’heure où nous écrivons ces lignes avec un patch.
Comme esquissé dans le paragraphe précédent, 12 Minutes est d’une incroyable rigidité. Les possibilités sont moins nombreuses que prévues et ne permettent pas au joueur d'expérimenter à sa guise avec les actions à réaliser. La liberté étant restreinte au point de devoir donner un objet entre deux lignes de dialogue (par exemple) sous peine de devoir recommencer une loop, on se retrouve souvent à recommencer une boucle similaire à la précédente parce que nous avons échoué à la dernière action. Le jeu ne permettant pas de passer les dialogues déjà vus lors d’une précédente loop, un sentiment de frustration se dégage assez vite du jeu, surtout quand celui-ci nous demande de réaliser des actions qui peuvent rendre très mal à l’aise à plusieurs reprises...
Le scénario, une aiguille dans une botte de foin
Tous les points abordés précédemment auraient pu faire de 12 Minutes une tentative honorable malheureusement ratée mais nous devons aborder le point le plus important de ce titre : son scénario.
L'histoire du jeu me semble équivalente à la subtilité d’un éléphant alcoolisé au volant d’un bulldozer fonçant droit dans un magasin de porcelaine. Aucune des thématiques de 12 Minutes ne sont abordées correctement, s’empilant au fil des twists dans un train fantôme direction le malaise. Le message, peut-être louable, du titre se perd dans une fausse complexité et dans une violence gratuite au regard du dénouement. Une fois le jeu achevé, on se demande pourquoi nous avons dû accomplir ces actions plus que dérangeantes, un grand nombre de fois, pour arriver à cette conclusion.
La maturité, une nécessité pour le jeu vidéo ?
Le jeu vidéo est-il devenu mature ? Voilà une question qui gâche beaucoup d’encre pour pas grand-chose ces dernières années. "Tout homme qui doit dire 'je suis le roi' n'est pas un vrai roi". Tant que les joueurs, la presse et l’industrie proclament le jeu vidéo mature, on pourra douter de cette affirmation.
Quoi qu’on en dise, le vrai contenu choquant de 12 Minutes n’est pas son fond, qui pourrait même sembler banal dans d’autres médiums (coucou Old Boy), mais sa qualité d’écriture médiocre qui banalise ses actions même les plus brutales sur l'autel de la boucle temporelle et du saint twist.
Nous sommes face à un jeu faussement subversif vraiment mal écrit qui pourrait prouver que non, le jeu vidéo n’a pas atteint la maturité tant déclamée ici et là. Pourtant est-ce vraiment le cas ? Peut-on avoir des jeux abordant correctement d’autres sujets sérieux que la vengeance et la parentalité ?
Des jeux vidéo abordant des thématiques fortes avec grâce sortent chaque année, nous avons pu jouer à des jeux comme Celeste qui a fait passer son message par la narration et le gameplay de manière subtile et bien écrite. Ces jeux n’ont pas besoin de se coller une étiquette "mature" sur le front pour combler un quelconque sentiment d’infériorité face aux autres arts. Parce que le jeu vidéo n’a pas besoin d’être mature pour produire des chefs-d'œuvre, il a besoin d’être sincère dans sa proposition.