French Tour Competition - Préparation d'un tournoi simracing déjà emblématique
Le championnat Mazda de simracing venant de s'achever avec de belles réussites, l'équipe organisatrice de l'événement se prépare pour la grande course qui suivra et qui parachève ces compétitions. En effet, la French Team Esport redéploie pour fin octobre toutes ses compétences en matière d'organisation esportive et enchaîne donc sur la toute première course de simracing physique en France : la French Tour Competition. Prévu pour le 30 et 31 octobre, ce tournoi d'endurance de 24h est l'occasion d'en apprendre un peu plus sur la discipline du simracing, son essor et de quelle façon s'organise une telle émulsion sportive, du coté des organisateurs comme des équipes concurrentes.
Être précurseur pour la première compétition physique
Contrairement aux tournois sportifs, une compétition d'esport a la chance de pouvoir se réaliser physiquement ou virtuellement. Cela décide alors des coûts d'aménagement, de la nécessité des sponsors ou de la gestion du public et de l'accueil des équipes. On ne compte plus les compétitions qui émergent ici et là, avec un essor esportif qui n'est plus à vérifier. Avec un boom en 2014, notamment grâce au succès des webtv de MilleniumTV, Youtube ou Twitch, les compétitions virtuelles ont prouvé leur sérieux, pour finalement vers 2019 devenir une discipline olympique aux jeux d'Asie du Sud-Est.
Un tournoi rendu possible grâce aux soutiens
Pour autant, on constate que la simulation de course automobile peine à se faire reconnaître dans le milieu. Il s'agit en très grande majorité de championnats virtuels, sans présence physique donc, avec des courses malgré tout très célèbres comme la SEAT LEON EuroCUP, la Blancpain GT Series ou encore le GT3 World Tour. La French Team Esport se démarque en France, en créant la première compétition de simracing physique. A l'international, ce genre d'événement existe mais de façon générale il demeure rare, la faute aux manques de soutien de la part des collectivités locales, déterminantes pourtant pour l'établissement d'un budget conséquent.
Le French Tour Competition profite à ce sujet d'un soutien de la part de la ville où se déroulera la course, à St Germain en Laye. Avec le gymnase des lavandières, la ville offre un beau terrain de bataille, et la région des Yvelines a également permis de subventionner l'événement. Il faut noter aussi l'importance des nombreux sponsors qui permettent non seulement de financer la logistique, mais surtout d'apporter l'objectif principal de ces compétitions esportives : les prix. Ainsi, Mazda, BenQ, Coca-Cola, OnexWear, ThrustMaster, Carrefour, Monster Energy, ou McDonalds proposent différents lots ou soutiens. On note également le sponsor d'Orange qui a une présence de plus en plus frappante dans l'esport et qui s'intéressait déjà de près aux compétitions en Outre-Mer.
L'entreprise Orange est une quasi-nécessité dans les tournois en Lan, puisqu'elle assure l'installation d'une connexion extrêmement fiable et rapide. La connectique, qu'elle soit électrique ou de données, doit être la plus parfaite possible pour le French Tour Competition, afin de garantir aux équipes les meilleures conditions.
Le choix du circuit
Les équipes devront concourir sur un circuit très célèbre dans la course automobile, qui charme n'importe quel pilote, qu'il soit simracer ou professionnel. Surnommé le toboggan des Ardennes, le circuit SPA Francorchamps est un choix de la French Team Esport qui engage les pilotes à démontrer tout leur talent. La course débute avec un virage extrêmement serré, nommé la Source, une épingle qui distingue tout de suite certains pilotes des autres, pour ensuite descendre avec célérité sur le Raidillon de l'eau rouge. Ce virage est le plus célèbre de la course et étant donné sa prise en grande vitesse, pour ensuite déboucher sur une côte de plus d'un kilomètre, il est à la fois dangereux et la chance d'un dépassement (avec la tristement célèbre mort de Stefan Bellof en 1985).
De façon générale, le circuit est connu pour la bravoure qu'il exige, puisqu'on y trouve beaucoup de lignes droites incitant à dépasser les 300 km/h, mais qui débouchent toujours sur des virages assez brutaux. Par ailleurs, la French Team Esport n'a pas encore communiqué les conditions météorologiques du tournoi, alors que le SPA Francorchamps est aussi connu pour son humidité et son climat capricieux. Certains paramètres seront communiqués à coup sûr quelques jours avant la French Tour Competition, comme c'est le cas souvent dans les compétitions internationales afin de surprendre suffisamment les équipes. Il en sera certainement de même pour le niveau d'adhérence, d'aspiration, l'usure des pneus ou leur constitution (tendre, moyen, etc.).
Malgré tout, le setup (type de volant, pédalier, etc.) est ouvert. La voiture est en revanche la même pour tous : la Toyota TS050. Les qualifications sur SPA se dérouleront en amont dans la matinée du samedi 30 octobre.
Affronter 24h de course virtuelle
La préparation mentale et physique des équipes
Pour se lancer dans une telle compétition, il faut savoir gérer son esprit et son corps avec précision et sang-froid. Rappelons que la French Tour Competition est une épreuve d'endurance, qui se déroule alors sur 24h non-stop, avec tout l'effort mental et physique que cela sous-entend. Avec 14 équipes, ce sont 56 pilotes qui se disputeront la première place, puisque par équipe on dispose de quatre pilotes prêts à se relayer. Pour une compétition de 24h, chaque pilote a ainsi 6 heures à tenir dans son cockpit, en étant le plus régulier dans ses temps. Les équipes sont donc à l'heure actuelle dans une préparation rigoureuse mais qui peut varier selon le niveau de professionnalisation de l'organisme.
Comme les pilotes professionnels Romain Grosjean ou Etienne Masson, les simracers doivent respecter une hygiène de vie raisonnable, afin de supporter sur une longue durée la même posture, d'encaisser les petits mouvements-réflexes qui brutalisent le corps, ou d'avoir la concentration la plus optimale. Dans l'équipe Alpine Esports, la préparation se découpe ainsi en trois parties : le paramétrage de la voiture, les exercices neuro-visuels, et l'endurance physique. Richard Arnaud, Team Principal d'Alpine témoigne ainsi :
Bien sûr, les Sim Racers ne subissent pas les forces G qui s’exercent sur le cou – et de manière plus générale, le corps – des pilotes professionnels. En revanche, le niveau de concentration qui est demandé lors d'une épreuve officielle est tout aussi stressant et stimulant que dans la voiture en réel.
Les exercices consistent donc à de la stimulation visuelle, qui a pour objectif de développer les réflexes ou la rapidité du traitement de l'information à l'écran. Aussi, il s'agit de développer la souplesse et la musculation des membres qui exécutent continuellement des micro-efforts durant la course. Le haut du corps, avec les poignets, le cou, le dos, mais aussi les genoux pour le pédalier sont entrainés pour le confort du simracer et de meilleures performances.
Les bons coéquipiers
Avec une course d'endurance, il est non-négligeable de construire avec son équipe des relations de confiance. Au cours de la compétition de 24h, il s'agira en effet d'obtenir l'aide de ses partenaires d'écuries, notamment pour être informé des occasions de dépassement, l'arrivée d'une voiture ambitieuse derrière soi, ou d'un accident à l'horizon. Malgré les écrans incurvés qui englobent souvent le cockpit du simracer, la vision périphérique n'est possible que dans un angle limité et la communication au sein de l'équipe devient donc extrêmement déterminante pour être informé sur son environnement.
En outre, l'équipe partage la même voiture tout au long des 24h, et même si elle a un léger temps de pause lors de l'échange des pilotes aux stands, il n'est pas possible de reparamétrer la configuration. Il faut donc que l'équipe équilibre la voiture à la façon de jouer de chacun. Cela consiste à ajuster au mieux la sensibilité de certains accessoires, ou de configurer le cockpit physique pour qu'il soit compatible avec chaque pilote.
Adopter le circuit et ses règles
L'équipe doit évidemment se préparer au circuit, et cela peut passer par une observation d'abord lente en entrainement, puis une exploration des limites de la voiture par rapport au terrain. Jimmy Broadbent, youtubeur et commentateur sur le Gran Turismo World Tour, conseille ainsi d'utiliser le schéma de trajectoire idéale proposé par le logiciel. Ce tracé qui s'affiche à l'écran du pilote propose la meilleure façon d'entreprendre le circuit selon les entrainements réalisés précédemment.
Il ne faut pas hésiter non plus à s'inspirer des plus grands, en suivant le joueur le plus rapide de la course afin d'apprendre de ses réflexes sur le circuit. Toutefois, dans le simracing il y a des lois de bienséance à respecter et un dépassement violent ou un départ agressif peuvent être soumis à un malus de temps. Comme le rappel Jimmy, "un dépassement est une danse où tous les partenaires doivent participer." Il faut le faire avec respect et tactique, en modifiant sa façon de conduire pour tromper l'autre par exemple. Lors du championnat Mazda, on a ainsi pu voir en grande finale le pilote italien Gino qui, avec un départ brutal, a provoqué un accident. Il s'est alors vu déclassé à la dernière position du classement final.
Un bon matériel physique et numérique
Enfin, la French Tour Competition a annoncé un setup ouvert, ce qui suppose l'utilisation du matériel personnel (pédalier et volant). Dans le simracing, même si ces éléments ne sont pas déterminants dans la réussite d'une course, ils sont un facteur non-négligeable qui peut permettre à un talent d'émerger. Le matériel n'est donc pas à prendre à la légère et on compte par exemple en moyenne 500 euros pour un volant de qualité chez le constructeur Fanatec.
Plus le matériel voudra être réaliste, avec retours de force, d'accroche ou sensation des drifts, plus l'entrainement sera de qualité puisqu'il permettra de ressentir le circuit et les limites de la voiture de façon instinctive. Il sera bien entendu plus onéreux et il faut compter environ 650 euros pour un cockpit (armature qui peut accueillir le volant, l'écran et le pédalier au lieu d'un bureau classique). A ce sujet, La French Tour Competition propose la revente de ses cockpits après le tournoi, au prix raisonnable de 350 euros. A ce jour, il reste 7 cockpits de disponible sur les 10 proposés à l'origine.
Mais les accessoires d'une course réussite c'est aussi un bon logiciel accompagnateur. En amont du tournoi, un logiciel de télémétrie apportera tout ce qu'il faut savoir sur la course, avec la meilleure façon de prendre tel virage, ou dans quelle partie du circuit le pilote peine à optimiser son temps. Racing Sim Tools, PCars Profiler, RS DAsh ou Sim Racing Telemtry sont des logiciels gratuits qui permettent d'obtenir tout un tas de données sur la façon dont un pilote aborde un circuit, ainsi que les points à améliorer. C'est une préparation stratégique que doit entreprendre toute équipe.
Un départ en trombe pour le simracing
L'essor d'une discipline
On le disait en début d'article, la discipline simracing demeurait jusque là mineure dans l'esport. Les compétitions préféraient se frotter à League of Legend, Starcraft, Valorant ou Fifa. C'est très certainement la faute à un budget onéreux pour le matériel de l'automobile virtuelle, et qu'il s'agisse de compétitions virtuelles ou professionnelles la course automobile a toujours été une catégorie sous traitée dans le sport (si on la compare notamment au football, l'athlétisme ou la natation qui suscitent plus d'engouement face aux limites physiques du corps humain sans cesse repoussées).
Mais 2018 a tout changé en la matière, lorsque la FIA (Fédération Internationale de l'Automobile) devient partenaire de Gran Turismo et organise les FIA Gran Turismo Championships. Cela donne un coup d'éclat à la compétition virtuelle et avec un organisme officiel en soutien le simracing acquiert enfin une réputation sérieuse. A l'origine de ce partenariat, il faut noter le succès du programme GT Academy, la première écurie qui vise à professionnaliser des simracers vers le métier de pilote automobile sur de véritables circuits.
Il faut rajouter que le covid a provoqué l'arrêt de toutes compétitions de course automobile, dépossédant le public de son sport favori. Le simracing ayant la capacité technique de continuer ses compétitions malgré la pandémie, c'est naturellement que ce même public a alors porté son intérêt sur ces courses très proches du réel, engageant de surcroit les sponsors à soutenir les dites compétitions. C'est le cas notamment avec la compétition Logitech G qui est intervenue pour "continuer à divertir les fans de sport automobile" en 2020 avec un succès retentissant. Par la suite, de plus en plus d'échanges entre les compétitions virtuelles et réelles s'opèrent et des écuries de grande réputation engage des simracers à assister leurs pilotes.
Une relation intime entre le virtuel et le réel
C'est le cas de Ferrari qui a dorénavant une équipe esport, composée de David Tonizza, Brandon Leigh, champions en 2018, 2019 et 2020, et Giovanni De Salvo.
A titre d'exemple, Lucas Ordonez est un cas frappant de passage du virtuel au réel; formé à la Nissan GT Academy, Lucas a su montrer son talent sur Gran Turismo 5 en étant le premier vainqueur, devenant alors le pilote officiel Nissan. Il a ensuite pris en main un volant professionnel pour participer aux 24 Heures du Mans.
De plus, les pilotes professionnels n'hésitent plus à prendre possession des simulateurs afin de s'entrainer, comme Romain Grosjean ou l'écurie de formule 1 Red Bull Racing. L'échange entre les pilotes virtuels et réels est bienfaiteur dans la tactique, car il apporte des expériences du circuit à la fois très similaires mais aussi très singulières, ne serait-ce que dans la recherche sécurisée des limites pour un simracer. Cela s'accompagne d'une technologie de plus en plus proche de la réalité, simulant chocs et retours de volant, avec des prix qui se démocratisent. On peut ainsi admirer à l'E-spot à Paris un espace dédié au simracing, avec des simulateurs flambant neufs fournis par l'écurie F1 Alpine. Lors de la French Tour Competition, un espace sera d'ailleurs proposé aux amateurs, avec des setups derniers cris, pour ceux qui souhaiteraient s'essayer à la course automobile virtuelle.
Fanatec et ThrustMaster figurent parmi les meilleurs constructeurs en la matière, et dans une collaboration avec BMW, Fanatec a su mettre au point le premier volant à la fois compatible avec l'interface virtuelle et réelle pour la voiture BMW M4 GT3. Enfin les simulateurs sont nombreux : IRacing, Rfactor2 ou Assetto Corsa figurent parmi les plus réalistes, tandis que GT, Automobilista et RaceRoom proposent une bonne simulation physique accessible.
La French Tour Competition entre de bonnes mains
La compétition de simracing qui séjournera durant Halloween (30 et 31 octobre) marquera un pas en avant dans la reconnaissance de la discipline. En France, c'est donc la French Team Esport en charge du tournoi, avec Christophe Goussard à sa tête, qui réussit à générer une compétition physique pour la première fois.
En Allemagne, c'est en 2018 que la DMSB (Deutsch Motor Sport Bund) est parvenue à faire reconnaître nationalement le simracing en tant que discipline officielle du sport automobile, postulant que « dans aucun autre sport la réalité et la simulation numérique ne sont aussi proche l’une de l’autre que dans le sport automobile ».
Avec l'attirail de sponsors et de partenaires dont il profite, sans parler du soutien d'une grande ville, on a tout à parier sur la réussite de la French Tour Competition. Celui-ci s'insère dans un essor du simracing sans précédent, qui le propulsera au devant de la scène esportive française. Son organisation est tenue par une équipe qui maitrise pleinement la discipline et qui connait ses atouts. Il ne manque plus que la fidélité du public d'amateurs pour amorcer ce démarrage qui s'annonce déjà tonitruant.