Le nouveau festival Ready Players, du 2 au 6 février, fait la part belle à l'expérience
Le Forum des images à Paris, créé en 1988, a toujours flirté de près ou de loin avec les espaces vidéoludiques. Avec pour objectif de constituer la mémoire audiovisuelle de Paris, le projet s'est élargi avec les nouvelles technologies. La relation à l'art vidéoludique s'est faite de plus en plus pressante, notamment avec la création en 2018 de l'école TUMO qui propose gratuitement aux 12-18 ans des formations ludiques sur les technologies créatives (cinéma, animation, graphisme, jeu, etc.). Cette année, le Forum des images consacre enfin cet attrait avec la création du festival Ready Players centré sur l'expérience des joueurs, il aura lieu du 2 au 6 février avec un programme très riche.
Un événement de culture populaire
Avec Ready Players, le Forum des images souhaite avant tout célébrer l'art vidéoludique sous toutes ses formes. Le festival s'adresse essentiellement aux joueurs, leurs expériences et ce qui remuent aujourd'hui la culture des jeux vidéo.
Sur cinq jours, Ready Players verra une grande variété d'intervenants venus exposer les enjeux de leurs métiers, allant du travail universitaire au créateur de contenu. À ce sujet, la soirée d'ouverture sera inaugurée par la présence des streameurs Nat'Ali, Mister MV et Ultia, qui parleront de leur pratique et notamment, si l'on prend le point de vue des viewers, du gaming par procuration.
Une large place a été offerte aux créateurs de contenus, avec le vidéaste Benzaie qui explorera le thème du "joueur créateur", ou quand le jeu est vecteur de productions parallèles, inspirées ou en son honneur. Mais c'est aussi l'occasion d'assister à une table ronde organisée par Jennifer Lufau, qui fournit un travail merveilleux sur l'importance des minorités dans le paysage vidéoludique depuis la création de son association Afrogameuses. À Ready Players, son intervention proposera de déconstruire les biais conscients et inconscients dans la création.
L'art des créateurs sur le devant de la scène
Ready Players sera aussi l'occasion d'en apprendre plus sur les métiers qui gravitent dans la sphère vidéoludique. C'est le sujet de deux Master Class, pour lesquelles les artistes graphistes seront mis sur le devant de la scène, notamment Jad Saber et Florent Lebrun qui ont tous deux œuvré à la palette artistique de Last of Us - part II. Pour expliciter davantage leur travail et notamment l'origine de leurs inspirations, une projection du film de John Hillcoat La Route viendra parfaire leur intervention et donnera certainement quelques clés supplémentaires de compréhensions sur les références scéniques du jeu.
L'autre Master Class introduira l'invitée d'honneur de ce festival, Jehanne Rousseau, graphiste, scénariste et productrice, afin qu'elle expose la chaîne de fabrication d'un jeu, à partir de son élaboration intellectuelle jusqu'à sa mise en vente matérielle (en prenant exemple sur Greedfall). Il faut également espérer, si le temps le permet, une mise en lumière du travail de Jehanne Rousseau, dont le talent a été décoré par la légendaire Muriel Tramis de l'ordre du Mérite l'année dernière.
Enfin, l'artiste Tatiana Vilela dos Santos propose une installation en quatre œuvres, qui sont sujettes à l'interaction avec le public. Sa pratique se nourrit des espaces ludiques et virtuels et développe en ce sens, avec Contre-ciel, deadPixels², L'Atlas des matrices, et GPU un parcours à explorer et toucher, transformant nos façons de jouer en objet visuel et en performance artistique.
L'expérience du joueur avant tout
Pour donner tout son sens aux objectifs du festival, des sessions de jeu prendront évidemment place, où le public aura cette fois son mot à dire sur la scène. Deux grands tournois se saisissent ainsi de la salle cinéma du Forum des images, avec une première session sur Skelittle: A Giant Party!!. Le second tournoi aura lieu sur TowerFall Ascension. Malheureusement il n'est plus possible de concourir pour ces deux compétitions, la faute à un engouement certain. En revanche il reste toujours de la place pour assister aux échauffourées.
À ce sujet, la Team Vitality sera présente pour narrer leurs aventures en esport et les étudiants de l'école de TUMO réaliseront l'exploit de créer un jeu en trois jours, pour une game jam qui sera restituée avec Jehanne Rousseau.
Enfin, pour une expérience sensible et intime du jeu, le chercheur Sébastien Genvo abordera la question autobiographique, au travers de sa création Lie in My Heart. Avec pour disciplines d'étude les jeux expressifs ou encore la sémiotique des médias numériques, l'intervention de Sébastien Genvo essaiera de délivrer les indices quant à la composition de soi dans le jeu, ce qui reste du créateur et de ses intentions.
Une première tentative de Ready Players pour fédérer les joueurs
L'événement du Forum des images se présente comme un moment culturel important qui tente de saisir les enjeux ou les implications qui se cachent derrière l'expérience personnelle du jeu. Entre tables rondes, interventions universitaires, sessions de gaming ou installations artistiques, Ready Players se constitue une matière pluridisciplinaire, sans jamais faire de distinctions entre ces domaines. Le festival a pour objectif d'embrasser les envies et aspirations de tous types de joueurs, pour élaborer ce qui semble être un univers vidéoludique français très varié.
Afin de clôturer le festival, un moment particulier est à noter. Avec le journaliste Erwan Cario, le grand quotidien Libération, fondé par Sartre et Maurice Clavel en 1973, voit la création du podcast Silence on joue ! en 2007. L'actualité vidéoludique y est décryptée chaque semaine depuis ce moment et Ready Players accueillera à ce sujet la 500ème émission d'Erwan Cario. À l'instar du festival, ce palier vient rappeler le chemin parcouru en France du point de vue de la légitimation et de l'empreinte culturelle du jeu vidéo.
À ne pas manquer, du 2 au 6 février, le festival ouvrira ses portes au Forum des images, avec une formule unique à 15€ pour accéder à toutes les séances. Plus qu'un festival d'actualité, Ready Players semble rendre hommage aux pratiques du jeu vidéo et rappeler qu'il s'agit toujours de la première industrie culturelle, que son étude n'a jamais été aussi prolifique et qu'elle est responsable d'une communauté aux liens sociaux forts.