Le célèbre jeu narratif de Dontnod Entertainment est de retour avec une suite très attendue par les fans depuis 3 ans. Life is Strange 2 dit "exit" aux personnages du précédent opus et nous emmène dans une histoire complètement inédite. Après une première saison couronnée de succès, le studio français avait enchaîné avec Vampyr, une autre excellente production. L'équipe en charge du premier volet est bien décidée à renouer avec le succès, voyons ce que vaut le début de cette nouvelle aventure.
On prend pas les mêmes et on recommence
Difficile de venir après le raz-de-marée d'éloges (et de critiques) qu'avait apporté l'histoire de Max et Chloé. Si le jeu avait su convaincre une bonne partie des joueurs, Dontnod repart désormais avec le handicap d'avoir déjà joué la carte de la surprise. Les ficelles sont connues et on se dit que le titre aura bien du mal à nous surprendre... Et c'est malheureusement le cas, du moins dans ses premières séquences.
Daniel et Sean Diaz, les deux héros de cette histoire
Nous suivrons les péripéties de deux frères: Sean, l'aîné âgé de 16 ans incarné par le joueur et son petit frère de 9 ans, Daniel. Ils coulent des jours heureux avec leur père dans leur petite maison de banlieue sans prétention. Mais un événement dramatique survient et ils devront fuir tous les deux à travers les routes de la campagne américaine. Sans révéler la teneur de ces événements, l'aspect émotionnel de la scène semble forcé et l'incompréhension de se retrouver devant un épisode de "Le jour où tout à basculé" domine. La situation manque de crédibilité tant le trait a été volontairement grossi. Une ellipse façon caméra embarquée de voiture de police semble avoir été insérée au forceps pour renforcer le côté mystérieux qui ne prend pas au moment crucial.
Et là..."tout bascule"...
Si nous étions à Poudlard, nous enlèverions dix points à Dontnod. Mais ne jugeons pas tout le scénario uniquement sur ces 10 premières minutes car, fort heureusement, la suite se bonifie petit à petit.
Beyond tout seuls
En effet, les deux frères, livrés à eux mêmes dans une situation qui les dépasse vont se rapprocher et apprendre à faire équipe dans l'adversité. D'abord confinés aux rôles du grand frère ado en pleine crise et du petit frère agaçant, une relation touchante, presque père-fils, va se développer. Les débuts sont un peu poussifs, mais on touche clairement à l'aspect le plus réussi de l'épisode : l'empathie que l'on ressent pour les deux protagonistes. Un duo que l'on voudrait protéger, et prendre sous notre aile. Deux petits gars courageux accablés par un combat, seuls contre le monde entier.
Si l'aspect dramatique n'a eu que des balbutiements à offrir en début de chapitre, les dernières scènes parviennent à nous tirer quelques petites larmes ou tout simplement à nous nouer la gorge, et c'est exactement ce que l'on recherche lorsqu'on se lance dans une aventure narrative quelle qu'elle soit !
La narration souffre néanmoins d'autres petits couacs qui peuvent gêner l'appréciation du travail réalisé par l'équipe, qui fournit pourtant de beaux efforts. On note par exemple un sous-texte antiraciste, plutôt osé et des références à l'arrivée de Trump au pouvoir. Bien que discrètes, ces allusions sont amenées maladroitement, caricaturant un message un peu facile pour donner un semblant de relief à des péripéties qui manquent d'impact.
Comme un petit creux...
La durée de vie demeure assez courte, ce qui n'est pas forcément gênant dans un épisode introductif, mais qui l'est davantage face au creux suivant la scène "tremplin" du soft. Nous sommes dans un jeu narratif volontairement contemplatif me direz vous, mais il y a une différence entre contempler et frôler l'ennui. En effet, sur les deux heures nécessaires pour arriver au bout du chapitre, on passera la plupart du temps à crapahuter au milieu de la forêt sans rencontrer personne, et visiter une station service peu fréquentée.
Le vide sera rempli par des "à côtés", ici, le cahier de croquis de Sean
Si vous n'êtes pas encore sujet au vertige, vous risquez de vous découvrir une peur du vide insoupçonnée. La faute également à un gameplay sans prise de risque, qui reprend des mécaniques très classiques de point & click et l'absence de possibilité innovante, comme le contrôle du temps dans le premier Life is Strange. Rien de bien passionnant à ce niveau là en somme. Rappelons nous cependant que nous ne sommes qu'au démarrage d'une nouvelle histoire, laquelle a besoin de temps pour grandir et révéler son potentiel, au risque hélas, de décourager certains joueurs.
De très rares rencontres...
Tout n'est pas à jeter aux oubliettes. Si le classicisme a pu avoir raison de votre patience, la petite subtilité de ce nouvel opus réside dans ce qui motive vos choix. Les conséquences de vos choix n'impacteront pas seulement votre personnage. Vous incarnez le grand frère, désormais, en conséquence, malgré vous, vous réfléchirez différemment. La pression qui s'exercera sur vos épaules et que vous ressentirez forcément à un moment ou un autre, est proportionnelle à celle que subit Sean qui prend la responsabilité de la sécurité de son jeune frère. Là encore, cet aspect est très réussi et il renforce encore les liens de sang qui unissent nos deux héros. Cet élément est encore un peu timide mais assez prometteur pour la suite de l'histoire.
Qu'on se le dise, en contrepartie, les amateurs de surnaturel auront peu de choses à se mettre sous la dent. Ce thème était omniprésent dans l'histoire de Max et Chloé, mais cette fois, il se révèle être extrêmement discret, probablement pour laisser le temps à l'intrigue de prendre son envol. Les scénaristes ont effectivement eu la brillante idée de mettre cela au second plan afin de garder notre attention sur la situation relationnelle entre Sean et Daniel. Celle-ci est le véritable pilier de l'histoire, l'occulter par de l’esbroufe aurait été une grossière erreur mais revers de la médaille, on se retrouve fatalement avec un prologue mou du genou point de vue action.
Qu'est-ce qu'elle a ma gueule ?
L'ambiance est importante, elle est forcément dépendante de la narration mais pas seulement. D'un point de vue visuel, le résultat est, là aussi, très mitigé. Nous avons des décors splendides, colorés et mis en lumière avec un véritable soucis du détail. Nos deux voyageurs arpentent les paysages de l'Oregon en plein automne, une saison propice aux paysages somptueux. La patte de Dontnod est présente, les environnements prennent quelques allures d'aquarelles tout à fait charmants... Paradoxalement, la modélisation des visages des personnages vient jurer avec ce tableau pourtant si bien mis en valeur. En effet, les protagonistes comme les personnages secondaires n'ont pas un rendu vraiment plaisant. Pire, les animations faciales semblent figées, on a la sensation de se trouver devant des statues de cire que l'on tente de ramener à la vie. On espérait beaucoup mieux d'un jeu axé autour de l'émotion et des liens familiaux. Qui plus est, c'est un défaut que l'on retrouvait déjà lors de la première saison, on aurait bien apprécié de ne pas le retrouver dans sa suite, en particulier après un tel succès commercial.
Pourtant, les dialogues sont convaincants, on remerciera à ce titre la justesse de jeu des acteurs qui prêtent leurs voix à tout ce petit monde. Ils sauvent véritablement toute la narration et sont criants de sincérité. Le petit Daniel est un petit garçon courageux et plein d'énergie qui a besoin d'être rassuré. L'interprétation de Sean quant à elle, fait ressortir le poids de ses responsabilités. Leurs petites chamailleries fraternelles laissent souvent la place à des instants plus posés et chaleureux qui, on ne le répétera jamais assez, portent tout l'intérêt de cette saison.
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Conclusion
Le premier chapitre de Life is Strange saison 2 est mi-figue mi-raisin. Malgré un certain nombre de maladresses à la fois dans la mise en scène, dans le propos sous-entendu ainsi que dans la modélisation des personnages, c'est la relation qui se construit entre les deux frères qui fait tout le travail. Le lien entre Sean est Daniel est, heureusement, ce qui fait battre le cœur de cette expérience narrative. Bien que les débuts laissent un arrière goût caricatural dans la narration, c'est en arrivant au bout de ce premier épisode, que l'on s'aperçoit de notre attachement pour nos protégés. Sans nous en rendre compte, leurs petites bouilles d'écorchés vifs prêts à affronter tous les obstacles nous ont complètement conquis et désarmés. Et croyez-le, c'était pourtant loin d'être gagné, le "ventre mou" que le joueur doit supporter pendant la majeure partie du chapitre aurait pu presque tout gâcher.Reste que si le démarrage aurait pu mieux se passer pour cette saison 2, on détecte un véritable potentiel affectif que l'on a hâte de retrouver pour la suite. En espérant que le message politique en sous-texte ne tirera pas toute la couverture vers lui, ou qu'il sera enfin utilisé avec pertinence.A suivre...Envie de vous plonger dans l'aventure de Life is Strange 2 ? Le titre est disponible à l'achat par [amazon_textlink asin='B07FCXKL4G' text='sur Amazon' template='ProductLink' store='jeuvide07-21' marketplace='FR' link_id=' f9996e85-c73b-11e8-930e-5be526dc0bfb'].