Représentations du futur – La dystopie, l'avenir sombre d'Half-Life
C’est parti pour le deuxième article de ce dossier sur le futur dans les jeux vidéo. Au long de ce papier numérique, nous allons voir plus large et nous attaquer à la dystopie. Quoi de mieux que de se replonger dans l’univers d’Half-Life pour comprendre ce que c’est ?
Minute culture avec votre rédac’ en pyjama
On inverse, contrairement à l’article sur le genre Cyberpunk, commençons par une petite définition de la dystopie. Par la suite, petit réveil nostalgique avec Half-Life pour rendre cette notion de dystopie plus concrète.
Faisons simple, la dystopie est un genre « parapluie » de science-fiction. C’est-à-dire qu’il regroupe plusieurs sous-genres comme le cyberpunk par exemple (ça vous dit quelque chose ça, non ?). Pour faire court, la dystopie est un genre d’anticipation imaginant un futur proche ou éloigné plutôt négatif et sous le joug d’une politique totalitaire.
Pour aller plus loin, dans la mesure que le cyberpunk est une forme de dystopie, elle est elle-même très appréciée. Elle est même aujourd’hui à l’origine d’innombrables univers futuristes, uchroniques et post-apo'. Je suis sure que vous avez plein d’exemples de jeux qui vous viennent en tête : Fallout, Beyond Good & Evil, Bioshock ou encore Metro 2033. Pour les fans de littérature et de cinéma, normalement vous devriez avoir quelques idées : 1984, Judge Dread, Bladerunner ou encore Black Mirror (avec pour chacun leurs spécificités).
Le post-apocalyptique, un autre futur sombre
Et les univers post-apocalyptiques dans tout ça ? Le lien entre dystopie et mondes post-apocalyptiques peut être flou, très flou. Afin de rester la plus claire possible sans encore trop approfondir au sujet du post-apocalyptique (un article est à venir !) quelques explications s'imposent. Un monde post-apocalyptique se passe dans un univers, une temporalité, où l'humanité a subi une énorme catastrophe. Cette dernière peut être de différents types : nucléaire, climatique, extraterrestre ou même sociale.
Tous les mondes post-apo' ne sont pas dystopiques et encore moins l'inverse, mais certaines dystopies peuvent à être à l'origine de futurs mondes post-apocalyptiques. Pour être concrets : à l'issue de conflits gouvernementaux totalitaires futurs (dystopie), une guerre nucléaire éclate. Suite à cette guerre, les conséquences sont terribles et plongent notre Terre dans l'apocalypse, après plusieurs années une nouvelle histoire essaie de se réécrire. Un monde post-apo' nucléaire issu d'une dystopie est né. Afin que vous vous situez mieux, l'exemple parfait est celui de Mad Max.
Sous fond d’engagement
Lorsque l’on parle de dystopie, il ne suffit pas de penser à des mondes apocalyptiques de types invasions de zombies. La notion de politique est centrale et primordiale. La dystopie se définit par un futur contrôlé par des politiques corrompues de telles ou telles manières. Imposant un monde presque impossible à vivre au peuple, ou en tout cas avec des conditions de vie chaotique. Au point où la pérennité de l’humanité est mise en péril voire déjà condamnée.
La dystopie sert très souvent de critique sociale sur divers sujets, bon vous l’avez compris, le totalitarisme en fait partie. Cependant, l’un des thèmes qui revient de manière récurrente est la surconsommation, qui est une véritable question de ces dernières années. On pourrait compter aussi celle du progrès du numérique mais je pense que nous avons assez dépeint cette idée au cours de notre début de voyage sur Cyberpunk 2077.
Pour le coup de vieux, c’est par ici
C’est le moment de parler d’Half-life, c’est parti pour quelques rappels. À votre avis, quel âge a Half-life ? Si vous comptiez compter sur vos doigts, sachez qu’il va falloir plus que deux mains parce que le premier de la série date de 1998, 23 ans donc. Vous imaginez 23 ans et des gens le découvrent encore. Un classique je vous disais.
Resituons-nous : Bienvenue dans le futur ! Nouvelle peau, vous êtes Gordon Freeman un scientifique reconnu au sein de Black Mesa. Le problème est qu’une expérience tourne au drame, les aliens envahissent le laboratoire, la catastrophe. Et là, vous me dîtes « Eh Banane, elle est où la politique là ? Ce n’est pas une dystopie alors ». Les aliens, c’est votre premier souci. Votre second, c’est l’UCEH (l'Unité de Combat en Environnement Hostile) une branche pas très nette de l’armée américaine qui semble quelque peu corrompue en éliminant toute trace de témoins.
C’est ici que la dystopie commence à pointer le bout de son nez. Gordon, enfin vous à présent, doit se battre contre les aliens mais aussi l’UCEH. Heureusement, vous êtes soutenus et aidé un petit groupe de rebelles.
Half-Life 2, en avant la dystopie
Grosso modo vingt ans après le premier épisode (dans le jeu), vous êtes toujours Gordon et vous vous retrouvez dans une ville d’Europe de l’Est. Plus précisément, vous vous retrouvez dans Cité 17, ville forteresse aux mains du « Cartel » qui contrôlent à présent le monde. "Le Cartel" est composé d'un peuple, une espèce à part, et vous, pauvre humain que vous êtes, êtes un esclave. Comme tant d’autres.
C’est ici que prend place la dystopie (personne n’a dit que le gouvernement devait être d’espèce humaine). En étant aux mains d’un groupe « tout-puissant », n’accordant aucune liberté, Cité 17 est en proie à la dictature.
Et s’il y avait un message derrière tout ça ?
Ceci ne sont que des spéculations d’une rédactrice. Mais force est de constater que la dystopie sert dans sa globalité à faire véhiculer un message engagé. Si on analyse l’univers dans lequel nous évoluons dans Half-life, on est à la frontière entre l’ultra-conservatisme et le futurisme.
Je m’explique, nous sommes en Europe de l’Est, des Trabant sont présentes, une dictature est en place. Ça ne vous rappelle rien ? On y sent une forte inspiration communiste. D’un autre côté, nous avons affaire à de nouvelles technologies qui n’existent pas encore, hyper poussées. Cette technologie, et la science notamment, qui a permis les dérives dans lesquels se retrouvent Gordon et ses amis.
On peut y voir alors une critique du communisme (un peu facile pour le créateur du jeu, un Américain). Admettons, une critique de la dictature en prenant un exemple concret et parlant pour le plus grand public puisque les Russes seront les éternels méchants dans les jeux américains. Et d’un autre côté, une critique du progressisme abusif. Half-life dépeint alors un rejet de ce qui a de négatif dans le passé mais aussi un rejet de ce qui peut être négatif par le futur.
Au cœur des discussions
Toute représentation dystopique ou autre méthode de dénonciation peut provoquer des polémiques et controverses. Dans le cadre où la politique est en jeu, c'est inévitable. Ce qui n'empêche pas son succès à travers les médias et est une source d'imagination inépuisable.
Par ailleurs, par sa relation étroite avec l'utopie, et dans la mesure où la définition d'un monde idéal est subjective, la frontière entre les deux genres est mince. La multitude de définition de la dystopie rendent, en soi, l'analyse du genre complexe et peut parfois (souvent) être matière de discussions. Pour vous donner une idée de la complexité, il existe notamment ce qu'on appelle la contre-utopie mais aussi l'anti-utopie. La définition présente sur la page Wikipédia explique très bien la différence entre les trois notions.
Encore ici, je vous présente des représentations du futur qui sont plutôt pessimistes. Il est vrai que bon, c'est dans la nature humaine que de se poser des questions existentielles sur une prétendue fin du monde proche. Et ce jusque dans la Bible !
À votre avis, existe-t-il des mondes futuristes où tout se passent bien dans les jeux ? C'est ce que nous verrons dans le prochain article de cette série !